Les héros de Rodilhan et la disparition de la corrida

Le 8 octobre 2011 est une date clé dans l’histoire de la corrida en France. A cette date, des femmes et des hommes, militants pacifiques et non-violents jusqu’au sacrifice, ont montré, une fois de plus, de quel côté étaient la dignité et la justice.

Ces militants, introduits dans l’arène de Rodilhan, ont senti sur leur peau (au sens propre) la « culture » des aficionados. Entre les protagonistes de la violence physique et les instigateurs de celle-ci, il n’y a eu, à Rodilhan, aucune différence. Entre le Maire (oui, le Maire) de la ville et le commerçant lambda, entre la police et un éventuel hors-la-loi, il n’y a eu, à Rodilhan, aucune différence. Car tous, quelles que soient leur position et leurs responsabilités, ont eu un même état d’esprit : aucune pitié pour les militants puisque ces militants, par pitié pour les taureaux, voulaient gâcher l’horrible spectacle. Les coups, les insultes, les attentats à la pudeur et les crachats ont coulé avec la même intensité que le sang des taureaux massacrés après l’expulsion des militants.

La « culture » des aficionados a montré, sous les caméras, son vrai visage haineux, lâche et violent. Comment nous faire croire que les toréadors luttent d’égal à égal avec le taureau quand les aficionados sont capables de frapper des militants enchaînés (donc incapables de se défendre) et non-violents (donc opposés à la violence) ? Comment pourront-ils, ces défenseurs du crime, continuer à affirmer que les militants sont violents ? Quelle excuse trouvera le législateur pour justifier ces actes qui découlent directement de cet apprentissage de la violence qu’est la corrida ? Qui a pu croire qu’apprendre à tuer nous rendait pacifique et civilisé ?

Le 8 octobre 2011, à Rodilhan, la civilisation a été violentée, conspuée, détestée. Ce jour, la non-violence a montré sa force profonde. Pendant 20 minutes, la lâcheté a librement déferlé, sous les yeux complices des forces de « l’ordre » mais la conviction des militants et leur dignité immense ont été au dessus de la bassesse de leurs opposants. Avec chaque coup reçu, avec chaque insulte subie, avec chaque crachat essuyé, les militants n’ont fait que s’élever tandis que leurs agresseurs s’abaissaient. S’il est facile d’expliquer et qualifier l’attitude des aficionados (car la bassesse est toujours simple), il est par contre impossible de caractériser l’attitude des militants. Comment décrire avec des mots le fait de sacrifier jusqu’à son corps pour défendre des êtres innocents ? Comment analyser avec des phrases la dignité qu’il faut avoir pour ne pas perdre de vue l’objectif et rester calme et respectueux tandis que la violence se déchaîne contre soi ? Il n’y a pas de description possible mais un seul mot, un mot qui éclaire cette attitude : héros. Ces militants sont des héros.

Le 8 octobre 2011, à Rodilhan, il y a eu 95 héros opposés à des centaines d’hommes ordinaires. Ces héros doivent rentrer dans l’histoire de la ville de Rodilhan et dans l’histoire de la cause animale.

Le 8 octobre 2011 marque un tournant décisif dans la lutte contre l’abomination qu’est la corrida. Ce jour scelle le début de la fin de cette torture publique. Il y a un avant Rodilhan et un après Rodilhan. Ce jour, les aficionados ont montré au monde entier qu’ils n’ont rien de beau à offrir à l’humanité et encore moins aux animaux. Après Rodilhan, aucun gouvernement, aucun responsable politique ne pourra affirmer que la corrida est une culture. Le pacifisme et l’éducation à la civilisation, valeurs dont les aficionados se targuaient jusque-là, ne sont plus que des mots vides. Pire, ce sont des mensonges, des manipulations évidentes, des techniques de propagande.

Le 8 octobre 2011 Rodilhan a montré à la France entière que la corrida appartenait à un autre monde, un monde que la loi combat, un monde de haine, de violence et de sang. Ce monde ne doit plus exister sur le territoire français. Notre gouvernement, si attaché aux valeurs humaines, n’a plus aucune raison d’autoriser la corrida. Nous savions que pour les animaux, elle était une torture. Les héros de Rodilhan ont montré qu’elle l’était pour les Hommes aussi.

Il est temps que les politiques montrent un peu de courage (je dis « un peu » car ils ne risquent rien de grave, eux) et fassent appliquer la loi car c’est pour cela que nous les payons. Il est temps qu’ils se mettent au service du peuple et non du pouvoir et de l’argent. Il est temps qu’ils prennent en considération les vraies valeurs, celles que les héros de Rodilhan leur ont enseignées : la dignité, la non-violence, la force de caractère, le sacrifice, l’amour des autres, la justice, le don de soi.

Le 8 octobre 2011 une scissure absolue s’est créée entre deux mondes : celui de l’héroïsme et celui de la médiocrité. La France et l’État français sont maintenant obligés de choisir. Il n’y a pas de juste milieu, il n’y a pas de moyen terme, il n’y a pas de chemin de retour. Il faut désormais choisir entre la civilisation et la barbarie absolue. Si nous ne suivons pas les héros, qui suivrons-nous ?

Le 8 octobre 2011 Rodilhan a eu l’honneur d’accueillir 95 héros. Sa plus grande erreur a été de les avoir expulsés. Mais en même temps que les héros, elle a chassé la légitimité de la corrida.

La corrida touche à sa fin alors que les héros sont désormais éternels.

PS : album photo ici. 


13 réflexions sur “Les héros de Rodilhan et la disparition de la corrida

  1. mouè pas mal de militants anti corrida tout aussi digne et courageux que ceux présents dans l’arène auraient aimé être au courant et pouvoir participer à cet évènement ainsi la vie des 6 taurillons aurait pu être épargné au lieu de seulement retarder leur massacre en assistant à un lynchage médiatisé !!! espérons qu’un organisateur ai pour but la prochaine fois de sauver les taureaux en informant le plus de militants possible au lieu de vouloir agir en petit groupe fermé pour attirer l’attention sur eux et le visage bien connu déjà des barbares lâches et cruels que sont les aficionados !!!

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    • Aicha ….tu n’as rien d’autre à écrire? j’y étais, et de lire ton commentaire ca me gonfle….Nous y sommes aller pour sauver les taureaux et pas autre chose, certe on a échoué mais en meme temps nous avons gagné en médiatisation pour la lutte CONTRE LA CORRIDA, tout ces évenements vont aider à l’abolition de ces sauvageries et pas de faire de nous des stars…..

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  2. La dignité et le courage des militants ne fait pas tout Aïcha,

    Les militants présents ce jour-là sont connus pour savoir garder leur sang-froid en toutes circonstances, et ont été « sélectionnés » sur le volet pour leur calme manifeste face à la violence. Ce qui a apparemment été un excellent choix, compte tenu de la tournure qu’ont pris les évènements.

    Le mot d’ordre était « Ne répondez ni aux insultes, ni aux coups ». Les consignes ont été respectées à la lettre n’est-ce pas ?

    La force du nombre n’est plus à démontrer, mais au-delà de la quantité, il fallait choisir la qualité.

    Quand à la Vie des Taurillons, les militants ont tout donné pour qu’elle soit épargnée, il ne faudrait peut-être pas se tromper de combat. Les participants ne sont en aucun cas responsables de leur sacrifice, ne nous trompons pas de coupables ! Ils ressentent un sentiment d’échec très profond tu sais…

    Quand à cette nouvelle petite guéguerre d’égos qui voit le jour, sache que les organisateurs et les militants savaient qu’elle aurait lieue.

    Don’t acte.

    Manquerait plus que les aficionados arrivent à nous diviser pour mieux régner…

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  3. Très bel hommage que ce texte !

    Blandine a raison : je n’y étais pas non plus et oui, ça fait mal parce que si on a la cause animale dans le sang, on aurait voulu y être par solidarité et non pour s’illustrer médiatiquement. Si, comme je viens de le lire, ceux qui n’ont pas été « sélectionnés » n’étaient pas considérés comme suffisamment valables, eh bien c’est que les orga ont leurs raisons et il faut le prendre de façon à s’améliorer et certainement pas pour casser ces militants qui ont risqués leurs vies !!!

    l’important c’est que ça a fonctionné et que maintenant les afiocs sont coincés et le reste n’est pas important.

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  4. Il y a un truc qui me chagrine dans cette action même si je suis sans doute mal placée pour en parler vu que je n’y étais pas, et je n’étais pas non plus à la répétition, au discours où les consignes ont été distribuées….
    On parle de héros et je trouve le terme un peu fort. Il n’y a aucune victoire.
    Justement, je me demande pourquoi être rester aussi passif(ve) quand les gens se faisaient lourdement agresser ? Pour les personnes qui se sont faites agresser, pourquoi ne pas bouger, changer de place, se méfier des gens derrière … ? Pourquoi vouloir à tout prix paraître une proie facile ? Ce n’était peut-être pas le but d’être une proie facile mais quand je regarde les vidéos, je ne vois pas de mesure de sécurité qui ont été prises pour éviter le pire.
    Je suis d’accord que c’est intolérable le comportement des pro-corridas, mais fallait peut-être se protéger en prévision rien que le fait que TOUT le monde porte des vêtements serrés, voire plusieurs couches. On sait que ce sont des gens potentiellement violents envers les humains surtout avec les actions déjà faites auparavant.
    Pour les personnes qui n’ont pas été agressé ou à peine, pourquoi ne pas prévenir l’autre que l’adversaire revient derrière, je pense là par exemple à la femme qui s’est faite déshabillé et au gars qui est revenu retirer le soutien-gorge, pourquoi ne pas chercher à protéger les gens assaillis ?
    Je pense qu’une action ne peut pas se faire au détriment de la santé physique et psychologique des gens.
    Il y a quelques mois, je me disais que cette action pourrait être bien, mais quand je vois le contexte, les consignes … j’en doute maintenant.
    Si le même type d’action se répète, je pense que la violence va s’amplifier de la part des pro et je pense pas que la solution soit de se mettre autant en danger.
    Dans tous les cas, j’espère vraiment que les militants garderont le moins possible de séquelles physiques et psychologiques car ça me fait vraiment mal de lire, de voir ce qui est arrivé à certain(e)s.

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  5. Je suis désolée de soulever ce point mais cela va toujours dans le même sens! ses ordures s’en sorte le sourire aux lèvres et fiers. J’admire le courage des manifestants, mais malheureusement on ne peu pas compter sur la justice d’aujourdhui pour bouger le petit doigt. La violence par la violence…. et il va falloir le comprendre! c’est insoutenable! Il m’est impossible de rester de marbre! que ses ordures prient fort pour ne jamais croiser mon chemin!

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  6. Bonjour !
    Moi je n’ai qu’une chose à dire : Bravo !
    Biensur j’aurai aimé être à vos cotés car j’ai aussi la rage comme c’est pas permis !
    J’ai beau être une femme, je n’en peux plus de voir la cruauté humaine, Je ne vois plus l’intérêt de mettre un h majuscule comme on doit mettre au terme de l’homme, nous ne méritons pas tout ce que la Nature nous offre !
    Nous n’étions pas à vos côtés mais je vous remercie pour les taureaux.

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  7. Moi je dis Bravo aux militants qui ont su garder leur calme malgré les circonstances. Si cela n’avait pas été le cas, cela ce serait transformé en un bain de sang et les acteurs et spectateurs « réels » des arènes ce jour là auraient d’autant plus eu satisfaction.
    Je suis écoeurée de la violence qui régnait ce jour là. Voir Monsieur le Maire s’amuser et encourager la situation, la police ne rien faire. C’est là l’image de la France ?!!! Un pays où les lois ne sont respectées que quand ça arrange. En 2011 en plus…

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  8. merci, ces héros me redonneraient presque foix en l’humanité. Continuez comme ça, j’espère qu’un jour la balance penchera de votre côté et donc du côté des animaux!

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  9. Bravo aux courageux militants.
    Je reste sidérée à regarder ces images où règne une telle violence. C’est vrai que l’on a mal pour toutes ces personnes volontairement exposées et qui ne bronchent pas. Je ne comprends pas les coups donnés notamment par ce jeune en noir qu’on dit être un élève toréador. Mais en quel pays, en quel siècle, sommes-nous?
    Et ces officiels, ce service d’ordre qui rigolent!
    C’est affligeant, révoltant, déprimant…
    J’espère comme vous que le combat ( car, c’en est bien un ) contre la corrida s’en trouvera renforcé. Mais la bêtise et la cruauté humaines sont bien vivaces et ce sera long!

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